Si aux Émirats arabes unis le nombre d’expatriés ne cesse de croître, les réformes juridiques de ces dernières années rapprochent de plus en plus le droit à Dubaï, du droit des pays occidentaux, mais avant tout, ces réformes visent à sécuriser les expatriés et les non-musulmans sujets principaux du droit dans les Émirats arabes unis, surtout dans les Émirats de Dubaï et d’Abu Dhabi.
Partant, Il était donc naturel notamment après la jurisprudence SA contre FA qui a vu pour la première fois de l’histoire, un droit autre que la charia s’appliquer en matière de divorce pour des expatriés non musulmans, de voir une évolution législative. Cette jurisprudence, est donc le point de départ de la loi du 3 février 2023, qui vient réformer le droit de la famille afin d’en faciliter son application pour les non-locaux.
En matière de divorce, cette loi vient d’une part accélérer le processus, à travers la création de nouveaux tribunaux dédiés dans chaque Émirats avec l’équivalent d’un juge aux affaires familiales. D’autre part, cette nouvelle loi fédérale vient apporter des précisions quant au régime de la pension alimentaire, de la garde, de l'héritage et de la filiation. Toutefois, seules les questions inhérentes au divorce seront abordées dans cet article.
I – Le régime du divorce aux Émirats
A - L’application de la loi aux expatriés
Cette nouvelle loi a donc vocation à une application spécifique aux expatriés et non musulmans. In concreto, les demandeurs doivent donc être des résidents avec une carte de validité en cours mais aussi titulaire du passeport de leur pays d’origine. S’agissant des défendeurs s’ils ne sont pas résidents des Émirats arabes unis, les tribunaux des Émirats arabes unis pourraient toujours être compétents en matière familiale dans certains cas, Notamment, si le demandeur est résident aux Émirats arabes unis et que le défendeur n’a pas d’adresse ou de résidence déclarée. En sus, lorsque l’enjeu du divorce est la garde, si les enfants résident Émirats la demande pourra être effectuée aux Émirats, Il en va de même pour les mariages contractés à Dubaï ou lorsque le défendeur est résident lui aussi.
B – La juridiction compétente
Une problématique peut résider dans le fait que l’un des conjoints a fait une demande le pays dont il détient le passeport, ce qui aurait pour conséquence une problématique de litispendance du fait qu’il y ait deux litiges similaires devant deux juridictions ayant compétences pour connaître du litige. S’agissant du cas de la France, le code de procédure pénale tranche le litige en faveur de la première juridiction à être saisie, à condition que la saisine du tribunal étranger soit régulière. Pour les Émirats, si les critères posés ci-dessus sont respectés les tribunaux spécialisés seront compétents quand bien même l’affaire serait en cours dans un autre pays.
II – La dissolution du mariage aux Émirats
A – Les modalités de dissolution du mariage
Au même titre qu’en France, il existe plusieurs types de divorce notamment, le divorce par consentement mutuel, ainsi que le divorce contentieux. S’agissant du premier, le divorce par consentement mutuel est indiqué lorsque les époux tombent d’accord sur les éléments principaux de la rupture du mariage et de ses conséquences. En effet, les époux concluent un accord de divorce à l'amiable sur les points essentiels tels que la garde, la pension alimentaire. Ainsi, cette procédure amiable permet de mettre un terme au mariage dans un délai de 2 mois.
Concernant le divorce contentieux, cette procédure s’applique lorsqu'il y a des désaccords entre les parties ou si l'une des parties refuse de donner son consentement au divorce, le mari musulman a le droit d'accorder le divorce à l'épouse sans raison ni faute.
Mais, si les épouses (musulmanes et non musulmanes) le souhaitent, elles peuvent déposer une demande auprès du Service d'orientation familiale pour engager une procédure de divorce contestée. Les maris non musulmans ont également ce droit. Le Département tentera de résoudre les problèmes entre les parties et, en cas d'échec, pourra délivrer un certificat de non-objection aux parties, qui poursuivront alors la procédure de divorce devant les tribunaux de la famille.
De manière générale, les tribunaux accorderont le divorce s'ils constatent qu'un conjoint est victime d'un préjudice (tel que l'adultère, la violence physique, la violence verbale, la séparation physique pendant une longue période ou le non-paiement de la pension alimentaire), ce qui fait croire aux tribunaux que la vie ensemble serait impossible pour les parties.
Si l'épouse n'est pas en mesure de prouver sa demande, l'affaire peut être rejetée. Dans ce cas, l'épouse aurait le droit de déposer une deuxième requête devant le tribunal pour obtenir le divorce.
B – Les modalités de garde conjointe
Selon la nouvelle loi fédérale, la garde des enfants est partagée jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 18 ans, après quoi ils auront le choix de décider avec lequel des parents ils souhaitent rester. L'un des parents peut demander que l'autre parent soit éloigné s'il est considéré comme ayant mis l'enfant dans un environnement inapproprié ou d'autres situations négatives, qui seront définies plus en détail dans les règlements d'application. En cas de désaccord entre les parents, ils peuvent se tourner vers un tribunal pour une décision concernant la garde.
Tout comme en France, l'intérêt supérieur de l'enfant reste le facteur clé dans tout litige de garde. Le tribunal peut également prendre d'autres mesures en cas de litige lié à la garde, en veillant toujours à l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans le cas où un témoignage est nécessaire, le témoignage d'une femme sera considéré comme équivalent à celui d'un homme. La pension alimentaire financière sera également déterminée en fonction de facteurs tels que la durée du mariage, l'âge de la femme et la situation financière des époux. Toutefois, la nouvelle loi ne fait aucune référence au principe de prestation compensatoire pour le moment.
Akram Cheik, Lawyer